Le changement ne peut effacer l’actif

C’est l’heure de l’ouverture d’un nouveau chapitre dans l’Histoire du Gabon, avec pour objectif de rectifier les erreurs commises, de renforcer les avancées positives et de réinventer une approche favorisant le progrès pour la communauté nationale. En nous inspirant des enseignements de Lavoisier selon lesquels « rien ne se perd, tout se transforme », nous comprenons bien que le passé ne peut être effacé. À ce titre, il offre des leçons et des opportunités de transformation pour construire un avenir meilleur. Les erreurs d’hier peuvent servir de base pour corriger les lacunes et les aspirations non réalisées peuvent être considérées comme des objectifs à atteindre. Il y a eu des aspects positifs et négatifs dans tout ce qui a été accompli jusqu’à présent. C’est pourquoi il était important d’examiner ce qui a été réalisé dans le cadre du Plan d’accélération de la transformation qui était la feuille de route du gouvernement gabonais pour la période 2021–2023. Pendant l’actuelle période transitoire, il est essentiel d’évaluer les acquis de ce plan. En consultant à nouveau M. Yves D. Sylvain Moussavou Boussougou, secrétaire exécutif du Conseil national du plan d’accélération de la transformation (CNPAT), nous avons souhaité contribuer à cette démarche.

Le Gabon a connu un événement exceptionnel : la prise de pouvoir intervenue le 30 août 2023 par les forces de défense et de sécurité réunies au sein du Comité pour la restauration des institutions (CTRI). Pour inédite qu’elle puisse paraître, la situation particulière dans laquelle le pays s’est engagé depuis quelques semaines peut également être perçue comme une opportunité pour donner un nouveau souffle en faveur de la transformation de son modèle développement économique.

Au lendemain de la chute du mur de Berlin et de la réunification des deux Allemagnes, l’ancien chancelier allemand Helmut Kohl rappelait dans un aphorisme resté célèbre que « l’économie c’est de la politique concentrée ». L’économie fait la politique. Elle en donne le sens.

La transition dans laquelle le Gabon s’est engagé aujourd’hui est l’occasion de poser les bases de l’économie nationale de demain. Celles-ci ne devraient pas s’éloigner de l’objectif poursuivi depuis près d’un demi-siècle : sortir du diktat du couple pétrole-dollar qui rythme les cycles de développement du pays.

Le dernier plan de développement triennal mis en œuvre dans le pays, connu sous le vocable de Plan d’accélération de la transformation (PAT) que nous avons eu l’honneur de piloter, nous donne des raisons de penser que même si le résultat final n’est pas parfait, des progrès ont été réalisés par rapport à la situation initiale. Ces progrès peuvent être valorisés et utilisés comme base pour de futures améliorations.

Si la question politique va évidemment dominer les débats, il importe de relever que le défi de la construction du dynamisme de l’économie, qui se fonde sur la confiance des investisseurs dans le pays, doit demeurer au centre de l’action publique pour créer de la prospérité et du bien-être.

Il est bon de se rappeler que le plan triennal 2021–2023 avait pour but de réactiver l’activité économique et sociale nationale durement touchée par la crise sanitaire brutale liée à la pandémie de covid-19 et d’accélérer la mise en œuvre des réformes structurelles et des investissements pour sortir le pays du piège de la dépendance à la rente pétrolière. L’ambition exprimée était de faire de 2021 l’année du coup d’envoi du rebond au Gabon avant de poser les fondements visant à mettre notre pays sur la voie de la transformation, de la diversification, les années 2022 et 2023 devant déterminer la trajectoire à prendre par le Gabon pour la prochaine décennie.

C’est ainsi que trois objectifs stratégiques avaient été définis dans le cadre de ce plan ambitieux. Le premier était de soutenir la mise en œuvre des projets de diversification des sources de la croissance afin de renforcer la résilience de notre économie face aux défis futurs en organisant les conditions de la montée en puissance des produits relais du pétrole tout en veillant à freiner la baisse de cette ressource au regard de son poids dans l’économie.

Le second objectif visait à renforcer les investissements dans les infrastructures tangibles et à dynamiser les réformes de l’infrastructure intangible. Il s’agissait d’une part de poursuivre la mise en œuvre des projets destinés à améliorer l’infrastructure de transport, du numérique, de production d’eau et d’électricité́, et d’autre part de s’engager dans la réforme des finances publiques et l’amélioration du climat des affaires.

Enfin, le troisième objectif consistait à transformer le modèle de redistribution en le concentrant davantage sur le soutien à la création et à la promotion d’opportunités d’emploi dans le secteur privé. De plus, il s’agissait d’améliorer l’accès à des services de santé de proximité́ de qualité́ pour tous, à renforcer les infrastructures éducatives et à réformer la gouvernance du système de protection sociale pour garantir une meilleure couverture et protection de tous les citoyens.

De manière globale, l’objectif de relance de l’économie gabonaise a été atteint. En effet, après avoir traversé une sévère récession en 2020, avec une croissance négative de 1,8 % due aux effets de la pandémie de covid-19, l’économie nationale a connu un début de reprise avec une croissance positive de 1,5  % en 2021 qui s’est accélérée pour atteindre 3,0  % en 2022. En 2023, la croissance du PIB devrait se situer sensiblement au même niveau.

Plus spécifiquement, dans les secteurs-clés des hydrocarbures, de la forêt, des mines, de l’énergie, de l’agriculture et de la pêche, d’importantes réformes ont été entreprises pour favoriser la réalisation de projets devant contribuer à réduire progressivement la dépendance du pays aux revenus issus de l’or noir.

  • Le secteur bois 

Dans le secteur bois, des actions déterminantes ont été conduites afin de soutenir la stratégie de transformation locale du bois et favoriser la disponibilité de la ressource pour l’industrie. À titre de rappel, un audit réalisé sur 599 permis a aidé à identifier 118 permis non conformes nécessitant un arbitrage et 81 dossiers non conformes à retirer.

Une revue de la situation fiscale des opérateurs forestiers pour améliorer les capacités contributives de la filière a été conduite tout comme la mise en place d’un système de traçabilité des bois coupés en vue d’assurer le suivi et le contrôle optimal de toutes les étapes d’exploitation de la ressource, de la coupe du bois à son exportation en passant par le transport et la transformation. De nouvelles plateformes industrielles ont été lancées dans le Moyen-Ogooué et le Haut-Ogooué pour favoriser l’augmentation de la contribution de la filière dans la création de la richesse nationale et des emplois.

Arrêtons-nous un instant sur les progrès enregistrés dans la poursuite de la mise en œuvre de la stratégie d’industrialisation de la filière bois. En effet, grâce aux nouveaux investissements réalisés et en cours, les résultats suivants peuvent être relevés : un PIB nominal généré par les activités liées à la filière bois en progression puisqu’il se situe à plus de 490 mds de F CFA alors qu’il était aux alentours de 116 mds de F CFA en 2010. Les investissements réalisés dans la foulée de la décision prise en 2010 d’interdire l’exportation des grumes et de créer, entre autres, la plateforme industrielle de Nkok ont eu un impact sur l’économie de cette filière. Les exportations ont crû de manière constante, représentant   aujourd’hui 15 % des exportations totales de notre pays, soit le deuxième produit d’exportation après le pétrole. Le nombre d’emplois directs et indirects créés a été multiplié par trois entre 2009 et 2023, faisant ainsi de la filière bois le premier employeur du pays avec près de 30 000 compatriotes vivant de cette industrie. Les recettes fiscales liées aux secteurs du bois ont été multipliées par trois depuis 2010, passant d’un peu plus de 10,5 mds à près de 48 mds de F CFA aujourd’hui. Sur un total de 16,4 millions d’hectares de forêts, 5,3  millions ont été labélisés FSC (Forest Stewardship Council), traduisant l’engagement du pays en faveur d’une utilisation responsable et durable de cette ressource.

En plus de consolider les investissements dans cette filière, il paraît nécessaire aujourd’hui d’améliorer ses capacités contributives, notamment en termes de  génération de revenus fiscaux supplémentaires et d’emplois de qualité.

  • Le secteur pétrolier

Outre divers projets visant à ralentir la baisse de la production, les efforts en vue de rendre la transparence dans le secteur ont été entrepris. Depuis 2021, le fonds de concours dédié aux investissements diversifiés et aux hydrocarbures (PID/PIH) est retracé dans les lois de finances. Et depuis le 21 octobre 2021, le Gabon a de nouveau adhéré à l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE). Cet objectif a été atteint et le premier rapport ITIE couvrant les revenus du secteur extractif en 2021 a été produit dans ce cadre.

Dans la filière gazière en cours de développement, des initiatives fortes sont en cours, portées par l’opérateur Perenco comme futur leader de la production du gaz pétrole liquéfié (GPL) et du gaz naturel liquéfié (GNL).

Ainsi, cet opérateur réalise un investissement privé de 30 mds de F  CFA pour construire une unité de production de gaz de pétrole liquéfié (GPL) à Batanga (Ogooué-Maritime), ainsi qu’un autre investissement beaucoup plus important, d’environ 900 mds de F CFA, pour une unité de production de gaz naturel liquéfié (GNL) qui se situera sur la plateforme logistique pétrolière de cap Lopez à Port-

Gentil. L’unité de production de GPL de Batanga, qui produira 15  000 tonnes de gaz domestique par an, devrait permettre de couvrir 60 % du besoin national et de réduire les importations de gaz butane de l’ordre de 80 % tout en favorisant la création d’une nouvelle chaîne de valeur et des emplois nationaux. Le projet de GNL du cap Lopez contribuera quant à lui à accélérer la transition énergétique du Gabon en rendant plus facilement disponible le gaz appelé à remplacer l’usage du gasoil dans les centrales thermiques de production d’électricité et positionner le Gabon comme exportateur de gaz. Ce sont de nouvelles recettes fiscales qui sont attendues également et qui viendront renforcer les finances publiques du pays.

Auparavant, un audit des réserves et des ressources de gaz pour tous les champs du Gabon a été effectué avec l’appui de Gaffney Clyne, société de conseil pétrolier. Cet audit a permis de révéler des réserves recouvrables estimées à 133 mds de m3 de gaz naturel.

  • Le secteur minier

L’exploitation du fer, avec les gisements de Belinga et de Baniaka, est en train de démarrer. L’assainissement de l’exploitation de l’or a été effectué à travers un état des lieux des permis des mines d’or à petite échelle. La création en avril 2023 d’une brigade minière dans la filière s’inscrit dans cette lignée. La Société équatoriale des mines (SEM), aux côtés d’autres opérateurs privés, structure progressivement cette filière. Après avoir constitué des réserves d’or de 350 kg raffinés et coulés en lingots pour une valeur de 13 mds de F CFA, elle a œuvré pour la mise en place de la première usine de transformation de l’or au Gabon et en Afrique centrale depuis juin 2022.

Grâce aux efforts conjugués des acteurs publics et privés dans la mise en œuvre de ces réformes et des projets d’investissement visant à diversifier les sources de création des richesses, des résultats significatifs ont été obtenus en 2022 et 2023 dans le secteur pétrolier : la production pétrolière a augmenté de 3,3 % à 75,7 millions de barils. Rappelons ici que la production de notre pays connaît depuis 2003 une baisse de l’ordre d’environ 20  %. La production de manganèse a également été dynamique grâce à l’activité des trois opérateurs principaux du secteur que sont CICMHZ dans le Moyen-Ogooué, Comilog et Noga Mining dans le Haut-Ogooué. Elle a atteint l’objectif de 10 millions de tonnes en 2023 tandis que le PIB minier du Gabon est en bonne voie d’atteindre l’objectif de 430 mds de F CFA fixé d’ici à 2025 puisqu’il se situe à un peu plus de 375 mds de F CFA en 2023.

  • Le secteur agricole

Concernant le secteur agricole, comme chacun le sait, le pays importe aujourd’hui près de 450 mds de F CFA de produits alimentaires pour nourrir sa population en raison d’une production locale insuffisante. Cette situation constitue un véritable problème économique et expose le pays à l’insécurité alimentaire avec une acuité accrue depuis la crise sanitaire liée à la covid-19 et le conflit russo-ukrainien qui ont aggravé la situation.

Pour relever ce défi de manière durable, 5 zones agricoles à forte productivité (ZAP) ont été créées dans les provinces de l’Estuaire, du Moyen-Ogooué, de la Ngounié et du Haut-Ogooué. Ces zones sont situées à Kango, Andem, Bifoun-Abanga, Idemba, Mboukou et Souba. L’objectif de ces ZAP est de fournir des solutions adaptées aux agriculteurs afin de garantir la sécurité alimentaire, de renforcer les exportations de produits agricoles et d’élevage tout en luttant contre la pauvreté grâce à la création d’emplois.

Kango est la première ZAP créée, sur une superficie de 12 000 hectares. 590 demandes d’exploitation y ont été validées, ce qui représente 4 548 hectares sur 574 parcelles attribuées. D’autres souscriptions sont en cours d’enregistrement et d’autres parcelles seront confiées pour exploitation.

Quant à la ZAP d’Andem, qui s’étend sur 10  000 hectares, elle est spécifiquement dédiée à l’élevage à grande échelle de la volaille. Des travaux d’aménagement sont déjà en cours par un promoteur de niveau international afin d’y installer des éleveurs et des producteurs locaux.

Enfin, dans la zone agricole à forte productivité de Souba, un opérateur privé, Afa Gabon, a lancé un projet d’exploitation et de production mécanisée de produits maraîchers dans une ferme agropastorale. Plusieurs actions ont été réalisées dont l’adduction d’eau sur 3,5 km, la mise en place d’une station de pompage, l’installation d’un réseau d’eau sur 10 hectares, le labour de 18 hectares par la coopérative du département ainsi que la plantation de 50 hectares de tomates et autant d’oignons. Estimée à 8 tonnes par semaine, la récolte hebdomadaire des tomates a commencé en octobre 2022 tandis que la récolte des oignons débutera en janvier 2024. Le défi auquel les pouvoirs publics doivent faire face est de faciliter le transport de cette production, y compris son exportation vers les marchés des pays voisins. Dans le même sens, le modèle économique de ces ZAP gagnerait à être stabilisé pour garantir leur succès.

Dans le domaine des agro-industries, nos performances en matière de production et d’exportation ont fortement augmenté pour ce qui concerne l’huile de palme et l’hévéaculture : la production d’huile de palme rouge a atteint 147 940 tonnes en 2022 contre 70  340 tonnes en 2020. Les exportations se chiffrent à 100  460 tonnes contre 46  595, contribuant ainsi à diversifier les exportations de notre pays. Les exportations de caoutchouc ont atteint 18  108 tonnes en 2022 contre 8  567 tonnes en 2020.

  •   L’élevage 

En matière d’élevage, grâce à un accord de reprise du Ranch Nyanga par l’opérateur Grande Mayumba Agribusiness Company (GMAC) appartenant au consortium sud-africain African Conservation Development Group (ACDG), le cheptel et la production bovine retrouvent de bonnes perspectives. Ainsi, le nombre de têtes s’est accru de 8 %, à 3 827 têtes bovines contre 3  545 têtes sur les 8 mois d’activité en 2021. La production de viande a atteint 45 225 kg, en hausse de 28,4 % en glissement annuel.

Ces progrès démontrent la réussite des efforts déployés pour diversifier les sources de création de richesse de l’économie gabonaise.

  • Les infrastructures

En ce qui concerne les infrastructures tangibles et intangibles dont le rôle est d’aider l’économie à être plus performante et compétitive tout en améliorant le bien-être des citoyens, le confort des usagers et la confiance du contribuable, la mise en œuvre de ce plan de développement a permis d’enregistrer quelques réalisations, à renforcer et à consolider, au cours des deux dernières années dans les domaines de l’eau et de l’électricité, en particulier avec l’extension de réseau de distribution d’eau dans le cadre des projets Pasbmir (avec le concours de la Banque mondiale) et Piepal (avec le concours de la Banque africaine de développement).

L’impact socioéconomique de ce projet important financé par la Banque africaine de développement à hauteur de 77 mds de F  CFA est réel à ce jour. 149 km de linéaires du réseau d’alimentation en eau potable (AEP) ont été renouvelés, 131 km étendus et renforcés, 4 châteaux d’eau construits, 20 km de linéaires du réseau au sein des bâtiments administratifs ont été réhabilités et 60 bornes-fontaines publiques construites. Le taux d’accès à l’eau potable qui était de 55  % en 2018 devrait se situer à 75  % au terme de la mise en œuvre du projet. Le taux d’eau potable non facturé qui était de 48  % en 2018 devrait être ramené à 5  % alors que le nombre de personnes supplémentaires desservies devrait augmenter de 300 000.

Pour couvrir l’ensemble des besoins en eau potable de Libreville et de ses environs et proposer une offre en eau potable abondante et soutenable à l’ensemble des populations, la signature d’une convention de concession entre l’État et Orelo en septembre 2022 permettra la construction d’une station de production d’eau de 130  000 m3/j. Ce projet permettra de réduire le déficit en eau potable de Libreville et de ses environs, de contribuer au financement du Plan de développement local de la localité de Kango et de créer 500 emplois (au pic du chantier), dont 80  % dédiés aux nationaux, avec un transfert de compétence au profit des ressources locales, en accord avec les objectifs de développement durable (ODD).

Financé à hauteur de 35,2 mds de F  CFA, le projet Pasbmir (eau et électricité) financé par la Banque mondiale a pour objectif d’élargir l’accès aux services d’eau et d’électricité dans les zones rurales ciblées, d’appuyer les efforts des pouvoirs publics visant à améliorer les conditions de vie des populations rurales, d’apporter une assistance technique pour la mise en place d’un cadre institutionnel spécifique et un appui dans la mise en œuvre du projet, et de renforcer les capacités des différents acteurs impliqués dans le projet ainsi que d’appuyer le ministère de l’Énergie et des Ressources hydrauliques dans un certain nombre de travaux analytiques et d’études. À ce jour, 160 km de lignes de distribution haute tension aérosouterraine (HTA), 140 km de lignes de distribution basse tension ont été construits en milieu rural et périurbain. Un linaire de 40,658 km de canalisations sur l’ensemble des chantiers eau a été posé, tout comme 27 forages réalisés dans les provinces de l’Estuaire, du Moyen-Ogooué et de l’Ogooué-Maritime, ainsi que de nombreuses études comme celles relatives au Plan directeur pour la production et le transport d’électricité, l’appui à la réforme des secteurs de l’électricité et de l’eau de la République du Gabon, l’étude du modèle économique et financier des secteurs de l’eau et de l’électricité au Gabon ou le plan de développement du système production de transport et de distribution d’énergie électrique à l’horizon 2040. 25  500 personnes sont touchées directement par ce programme. Le niveau de réalisation global des projets Pasbmir est actuellement de 77,15 %.

D’autres projets d’électricité ont été lancés. Les travaux de construction du barrage hydroélectrique de Kinguélé Aval de 34,5 MW de puissance ont été lancés (118 mds de F CFA). La zone d’Andock Foula, autour du chantier, a vu sa population passer de 22 à 145 personnes. L’école publique de la localité a été rénovée et 350 emplois ont été créés, dont 212 employés nationaux. Le projet apportera 13  % des besoins en électricité de Libreville. 700 emplois seront créés au pic du chantier. À ce projet s’ajoutent ceux de la construction du barrage hydroélectrique    Ngoulmendjim (83 MW, 392 mds de F  CFA), des centrales à gaz d’Owendo (120 MW, 104 mds de F  CFA) et de Mayumba (21 MW, 54 mds de F  CFA) conduits par l’opérateur Gabon Power Company, filiale du Fonds gabonais d’investissement stratégique (FGIS).

En outre, un plan d’urgence en eau et électricité́ comprenant 28 projets dans les 9 provinces du pays a été lancé en 2020. Il affiche un taux de réalisation de 79,2 %. Il est financé par la République gabonaise.

S’agissant du volet infrastructures de transport, le projet s’est concentré sur trois objectifs visant à développer les infrastructures de transport pour favoriser le développement économique et faciliter le déplacement de la population. Dans ce domaine, en dépit des attentes qui restent nombreuses et du retard enregistré par le pays, il convient de relever quelques avancées notables. L’action publique dans le domaine des routes a enregistré́ des réalisations concrètes quant à l’aménagement des voiries urbaines dans le Grand Libreville et à l’intérieur du pays. Ces infrastructures, pour la plupart finalisées, ont été réalisées dans des quartiers densément peuplés avec un impact positif sur le quotidien des nombreux usagers de ces voiries urbaines. Il s’est agi également de réhabiliter les voiries provinciales et départementales. Au total, 102,4 km de voiries urbaines ont été réalisés ou sont en cours de réalisation.

L’emblématique projet de la Transgabonaise a été lancé en 2021. Il consiste en l’aménagement, le financement, l’exploitation et la maintenance de la route économique d’un linéaire total de 828 km. La Transgabonaise traverse 6 provinces et s’inscrit dans le « corridor de développement transgabonais ». Ce corridor est l’axe central du pays. Il concerne 70 % de la population totale du Gabon et assure la totalité́ du transport de manganèse et la majorité du transport de grumes. Le projet de la Transgabonaise est scindé en 3 étapes. Les travaux affichent un taux d’exécution de 77  % sur le premier tronçon P24-PK105. Des résultats significatifs peuvent être perçus sur le premier tronçon en travaux, notamment la réduction des temps de trajet et l’amélioration des conditions de circulation.

Il est aussi important de noter que deux rocades sont en cours de construction. La rocade nord et la rocade sud. La construction de la rocade nord, également appelée voie d’accès au nouvel aéroport international de Libreville (NAIL) est mise en œuvre dans le cadre d’un partenariat public-privé (PPP) entre l’État et GSEZ Airport, concessionnaire de l’aéroport international de Libreville (AIL).

Cette voie constituera la future voie d’accès au nouvel aéroport international de Libreville, dont le terminal sera désormais situé à l’est du site actuel de l’aéroport. La route projetée permettra également d’améliorer les conditions de circulation entre les communes de Libreville et d’Akanda, et de résoudre les phénomènes de congestion de trafic constatés quotidiennement sur cet axe très fréquenté́. Il s’agit d’une voie de contournement de 5,25 km de route en 2 × 3 voies chacune (53 % de taux d’avancement physique).

En vue de prendre en compte les personnes et les activités concernées par le projet, une installation agricole et d’élevage porcin a été développée à Ayémé Plaine (installations d’irrigation, réseaux électriques, etc.) tout comme 62 logements ont été construits à l’Igad à Alibandeng pour accueillir les personnes affectées par le projet et qui ont fait le choix de ce mode de compensation.

Enfin, la rocade sud est mise en œuvre dans le cadre d’un partenariat entre l’État et la Banque islamique de développement (BID) au travers du fonds d’investissement Rise Gabon et de sa filiale la Société́ d’aménagement du Grand Libreville (SAGL). La rocade sud aura un linéaire d’environ 12,7 km en 2 × 2 voies reliant la RN1 à Owendo. L’objectif visé par le projet de construction de la rocade sud reliant la route nationale 1 à Owendo, dite « Owendo Bypass », est le développement économique et social de cette zone via l’optimisation logistique et l’aménagement urbain.

Enfin, trois chantiers routiers majeurs sont en cours de redémarrage : Moanda-Bakoumba (30  km, Sinohydro), Ovan-Makokou (98 km, CFHEC) et Ndendé-Tchibanga (91 km, Covec).

La montée en puissance de l’exploitation minière, notamment dans le secteur du fer, présente de nouveaux défis pour le chemin de fer. Afin de faire face à ces défis, un plan d’augmentation de la capacité (PAC) du réseau transgabonais et des investissements est prévu. L’objectif est d’augmenter la capacité actuelle afin de transporter 7 millions de tonnes supplémentaires par an, passant ainsi de 12 à 19 millions de tonnes transportées d’ici fin 2027. Par la suite, il est prévu une augmentation supplémentaire de la capacité pour atteindre un total additionnel de 10 millions de tonnes transportées par an, passant ainsi de 19 à 29 millions de tonnes transportées. Pour atteindre ces objectifs, il est prévu un renforcement des capacités du chemin de fer en augmentant la taille des trains et en réduisant les distances entre deux gares. De plus, une multiplication des voies croisements est envisagée dans toutes les gares afin d’améliorer la robustesse du réseau face à l’augmentation du trafic et du fret.

Ces résultats et perspectives démontrent la nécessité de regarder au cas par cas en vue de poursuivre les efforts de modification de la trajectoire économique du Gabon.

  • L’immobilier

Dans le domaine de l’immobilier, plusieurs chantiers ont été livrés, notamment le complexe résidentiel Magnolia. D’autres ont repris et affichent des niveaux d’avancement appréciables. Le projet de la Baie des Rois a été relancé. La réforme foncière a été entamée, avec notamment la mesure-phare de l’assainissement de la situation du foncier à Libreville.

  • Le social

Sur le plan social, la mission du PAT consistait à poser les bases d’un modèle social plus inclusif avec pour ambition d’agir à la baisse sur le nombre de personnes vulnérables. Ainsi, les domaines de l’emploi, de la formation professionnelle, de l’éducation, de la santé et de la protection sociale ont été privilégiés.

Dans ce sens, le Code du travail adopté en novembre 2021 vise à offrir aux employeurs un outil facilitant l’accès à l’emploi, en particulier pour les jeunes. La réforme du Pôle national de promotion de l’emploi (PNPE) a été menée à terme. Elle va permettre aux demandeurs d’emploi, notamment les jeunes, d’accéder à deux types d’insertion : l’emploi salarié et l’auto-emploi. Deux nouveaux bureaux du PNPE ont été ouverts à Ntoum et Koulamoutou. Cette réforme a d’ailleurs permis à 5  589 jeunes de bénéficier d’un accompagnement à l’emploi entre 2020 et 2023. Le projet « Un taxi, un emploi, un avenir » vise à permettre à de jeunes Gabonais de devenir propriétaires d’un taxi. À ce jour, 21 jeunes de la province de l’Estuaire ont bénéficié de ce programme

Par ailleurs, des progrès ont été réalisés dans le domaine de la formation professionnelle, notamment par la réforme de l’Agence nationale de la formation et de l’enseignement professionnel (Anfep), acteur principal du secteur. Un investissement financier considérable a été entrepris dès le début du deuxième mandat pour combler les lacunes accumulées au fil des décennies.

Il convient de rappeler ici que le Gabon a bénéficié d’un financement de 173 mds de F  CFA de la part de la Chine, de la Banque mondiale et de la Banque

africaine de développement dans le domaine de la formation professionnelle. Ces fonds ont été utilisés pour la construction de 5 grands centres multimétiers hautement équipés situés à Nkok, Mvengué et Port-Gentil et offrant des formations dans de nombreux domaines techniques, dont les métiers du bois, du bâtiment, des travaux publics et des technologies de l’information et de la communication (TIC). Un centre de formation professionnelle dans les métiers du transport et de la logistique a été édifié et cofinancé par le Royaume du Maroc.

En parallèle, des projets de réhabilitation complets ont été entrepris sur le plan national pour 13 lycées techniques et 9 centres de formation professionnelle et de perfectionnement. Ces projets de réhabilitation sont en bonne voie et permettront la création de 11  500 nouvelles places d’apprentissage technique et professionnel à travers tout le pays.

L’ambition portée par l’État ne s’est pas limitée aux infrastructures. En effet, 80 curriculae de formation technique ont été développés dans le but de renforcer l’adéquation entre les compétences acquises par les jeunes et les besoins des employeurs afin de faciliter leur insertion professionnelle et de réduire le chômage. Résultat de ce vaste mouvement de réforme, 53 apprenants issus du Centre international multisectoriel de Nkok sont actuellement en stage d’apprentissage auprès d’un des principaux groupes industriels du pays. La forte demande de formations spécifiques adressées au Cimfep (Centre international multisectoriel d’enseignement et de formation professionnelle) de Nkok témoigne de la pertinence de la mise en place ces dispositifs de formation.

  • L’éducation 

Les actions entreprises dans le domaine de l’éducation dans le cadre du PAT ont visé à améliorer les capacités d’accueil des établissements scolaires du secondaire et à réformer les curricula et programmes de formation. Dans ce cadre, des projets d’achèvement, d’extension, d’acquisition, de construction et de réhabilitation des établissements scolaires du secondaire ont été engagés depuis 2021, avec certains projets achevés et d’autres en phase d’achèvement.

Pour moderniser la formation et l’enseignement technique et professionnel, plusieurs initiatives ont été prises, notamment l’harmonisation des diplômes et titres, l’amélioration de la gouvernance des établissements de formation et des centres multisectoriels ainsi que la rédaction des manuels de procédures et des plans de développement stratégique des établissements.

Des actions ont également été réalisées pour accompagner la modernisation pédagogique et la mise en œuvre des réformes, telles que la formation des chefs d’établissement à cette mise en œuvre et au leadership institutionnel, le renforcement des capacités pédagogiques et numériques des enseignants ou la rédaction des manuels de procédures des chefs d’établissement du second degré.

L’évaluation dans ce secteur à ce jour présente des résultats fort satisfaisants : 956 nouvelles salles de classe ont été construites sur les 3  500 prévues, soit 27,31 % ; 2 375 salles de classe ont été réhabilitées. 1  953 enseignants ont été formés (dépassant l’objectif initial de 1  400) ; le taux de réalisation en termes de formations de l’encadrement pédagogique est de 49 %, avec 84 encadrants formés sur les 170 prévus.

  • La santé

L’un des objectifs que le pays s’est fixés est celui de contribuer à l’état de bonne santé de la population en mettant en œuvre des projets et des réformes axés sur la prévention et en luttant spécifiquement contre les déserts médicaux afin de garantir un accès aux soins de santé primaires et d’offrir un cadre de santé communautaire de qualité pour tous.

Pour ce faire, la stratégie sectorielle arrêtée a prévu l’amélioration de l’offre de soins en opérationnalisant les départements sanitaires. Certains chantiers ont été lancés, d’autres livrés. Il s’agit de la construction, de la réhabilitation, de l’extension de plusieurs infrastructures sanitaires, notamment à Léconi, Okondja, dans le Haut-Ogooué, Fougamou, Ndendé, dans la Ngounié, Ovan et Mvadi dans l’Ogooué-Ivindo, Mitzic et Medouneu dans le Woleu-Ntem. Ces projets sont financés par l’État avec le concours de l’Agence française de développement (AFD) dans le cadre du Programme d’appui au secteur sanitaire (Pass), phase II. Ils complètent un programme étatique comprenant l’achèvement des travaux des hôpitaux départementaux de Ntoum et Moanda, les hôpitaux de La Peyrie et de Nzeng-Ayong ainsi que l’achèvement de l’Institut des maladies infectieuses sur le site de l’ancien Hôpital pédiatrique d’Owendo, la réhabilitation et le renforcement des plateaux techniques des centres hospitaliers de Franceville, Mouila, Makokou et Oyem. Tous ces travaux seront livrés avant la fin de cette année 2023.

Pour rendre les médicaments et les dispositifs médicaux essentiels disponibles et accessibles à un plus grand nombre, une réforme de l’Office pharmaceutique national (OPN) a été amorcée en 2021. Des pharmacies hospitalières ont été mises en place dans les centres hospitaliers universitaires (CHU) de Libreville et Owendo, et ce programme sera étendu aux centres hospitaliers régionaux (CHR) et au centre hospitalier universitaire Amissa Bongo de Franceville. Il est important de noter dans ce domaine qu’en 2021, avant la réforme, seuls 20 % des médicaments étaient disponibles dans les structures de santé publique, voire seulement 11 % dans certaines provinces. En 2023, cet indicateur est passé à 50 % avec une réduction de la disparité au niveau des capitales provinciales du fait de la réhabilitation des antennes régionales. Le problème de la disparité demeure dans les départements et devrait être résolu avec la construction des hôpitaux départementaux.

Au total, à fin 2022, 101 structures hospitalières de soins primaires étaient en cours de réhabilitation pour un taux de réalisation de 67,3 % calculé sur une cible de 150 structures à réhabiliter d’ici 2025.

Enfin, en ce qui concerne le volet affaires sociales, il a poursuivi deux objectifs majeurs : la réforme de la gouvernance des organismes de protection sociale et la mise en place opérationnelle du fonds  4 de la Cnamgs. Ces réformes majeures sont en cours de mise en œuvre. La Caisse compte aujourd’hui 1,750 million d’assurés, soit 76  % de la population totale. L’opérationnalisation de ce fonds permettra d’atteindre la couverture maladie universelle à l’horizon 2024. Elle devrait permettre d’assurer les travailleurs indépendants, les assurés volontaires, les résidents étrangers et les gens de maison. Environ 800  000 personnes devraient contribuer et bénéficier des prestations de ce fonds. Une campagne de sensibilisation et de souscription auprès des populations cibles et parties prenantes impliquées en 2 phases est en cours de lancement.

Quant à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), les bases d’une gouvernance plus moderne ont été posées. La Caisse sera désormais plus flexible dans l’ajustement de ses paramètres pour retrouver un équilibre dans 4 ans si elle maintient les efforts de réduction des charges en cours. Le retard accumulé sur les prestations techniques a été rattrapé à près de 95  %. L’ensemble du modèle doit également rattraper le retard technologique, au-delà du chantier sur le contentieux qui doit également être ouvert, notamment avec les fournisseurs, les salariés CNSS et quelques bénéficiaires des prestations.

  • Conclusion

L’un des défis de cette période de transition pourrait consister à améliorer la gestion globale des projets ainsi que les aspects liés à leur financement afin d’assurer la capacité́ de l’État à les mener à bien. Le défi du financement revêt une importance prépondérante pour favoriser le progrès économique et social. Il est essentiel d’optimiser les instruments de financement public existants en les unifiant et en digitalisant leurs pratiques, afin d’améliorer la mobilisation des ressources internes tout en renforçant la maîtrise des mécanismes de financement innovants tels que les partenariats public-privé (PPP). De plus, il convient de créer d’autres instruments adaptés aux défis du développement qui nécessitent des ressources à plus long terme pour soutenir le secteur bancaire privé actuel dans le financement des projets structurants.

En ce qui concerne la gestion des projets d’infrastructures, il est important d’améliorer la conception des projets, les procédures de passation des marchés et la qualité de leur exécution.

Du point de vue de la conception des projets, il me paraît essentiel de les prioriser en se fondant sur les documents stratégiques. Le Gabon doit confirmer son engagement envers une approche institutionnalisée de l’État stratège, qui repose notamment sur une vision à long terme régulièrement mise à jour. Dans cette optique, il est nécessaire de mettre en place une structure dédiée à la planification et à la programmation du développement du pays.

Dans le domaine de la passation des marchés, il devient impératif de choisir soigneusement les entreprises et les bureaux d’études chargés du contrôle. Il est également nécessaire d’introduire dans les contrats des clauses prévoyant des pénalités en cas de retard ou d’abandon des chantiers. Cela représente un défi non seulement pour assurer l’efficacité, mais aussi pour garantir l’efficience dans la gestion des finances publiques.

Enfin, il est primordial de suivre quotidiennement l’exécution des projets. Ces derniers sont souvent confrontés à un grand nombre de défauts techniques, d’erreurs et de retards. Le contrôle pendant l’exécution joue donc un rôle central et décisif dans le succès global du projet.

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