LA RÉVOLUTION DE L’OR GRIS EST EN MARCHE, LE GABON FUTUR LEADER AFRICAIN DU FER ?

Longtemps dominée par le pétrole et le manganèse, l’économie gabonaise amorce un tournant stratégique. L’or noir constitue la principale source du PIB du Gabon, tandis que ses 25 % des réserves mondiales de manganèse le positionnent en tant que premier producteur mondial. Les quelques 2 milliards de tonnes de fer gabonais retiennent l’attention d’investisseurs étrangers. Deux gisements majeurs, Belinga et Baniaka sont susceptibles de transformer le paysage industriel national.  Entre potentiel économique, infrastructures en développement et nouveaux partenaires stratégiques, l’or gris pourrait devenir l’un des piliers de la diversification économique du Gabon.

Le sous-sol gabonais recèle plus de 2 mds de tonnes de minerai de fer, faisant du pays un acteur potentiel de premier plan sur le marché africain. Deux sites en particulier attirent l’attention des investisseurs. Le premier n’est autre que Belinga. Situé dans l’Ogooué-Ivindo, ce gisement contient environ 1,5 md de tonnes de minerai à très haute teneur en fer. Après des décennies d’immobilisme, son exploitation a été relancée en 2023 avec un investissement initial de 200 millions de dollars par Fortescue Metals Group, destiné aux études de faisabilité et aux premières infrastructures. Moins connu, le second est celui de Baniaka. Localisé dans le Haut-Ogooué, ce gisement piloté par Genmin dispose de 760 millions de tonnes de ressources minérales certifiées, dont 100 millions de tonnes exploitables à plus de 62 % de fer. L’investissement initial est estimé à 155 mds de FCFA, avec un début d’exploitation prévu dès 2025.

Ces ressources arrivent sur un marché où la demande en fer demeure soutenue, portée par la Chine, l’Inde et les États-Unis, qui cherchent à sécuriser leur approvisionnement face aux fluctuations des grandes places minières traditionnelles comme l’Australie et le Brésil. La proximité relative du Gabon avec les grands ports de commerce africains pourrait représenter un avantage logistique non négligeable.

L’exploitation de ces gisements nécessite d’importants investissements en logistique et en énergie. Plusieurs projets sont déjà engagés pour structurer la filière. Le Transgabonais modernisé en est le parfait exemple. La voie ferroviaire reliant Franceville à Owendo est en cours de réhabilitation pour accueillir le transport de minerai. À Baniaka, un corridor route-rail de 70 km doit être aménagé pour relier la mine au chemin de fer, facilitant l’exportation jusqu’au port minéral d’Owendo, le point d’embarquement vers les marchés internationaux.

En outre, un contrat de 20 ans a été signé avec la Société de patrimoine pour fournir 30 MW d’électricité à partir du barrage de Grand Poubara, garantissant une alimentation stable aux installations minières. Ces investissements visent à rendre l’exploitation plus compétitive et à assurer une montée en puissance rapide de la production.

Les premières projections économiques du projet Baniaka annoncent des recettes fiscales et minières importantes – 50 mds de FCFA attendus en impôts sur les sociétés (IS) et 120 mds de FCFA issus des royalties minières – ainsi que 700 emplois directs et plus de 2000 emplois indirects créés sur la durée du projet. Si le site de Belinga atteint son plein régime, ces revenus pourraient être démultipliés, contribuant à élever la part du secteur minier dans le PIB national.

Au-delà de l’extraction et de l’exportation, la transformation locale du fer est un axe stratégique qui pourrait permettre au Gabon de maximiser les retombées économiques. Aujourd’hui, selon l’accord conclu avec Genmin, 60 à 70 % de la production de Baniaka sont destinés à être transformée sur place, mais des projets plus ambitieux sont d’ores et déjà envisagés. L’implantation d’usines sidérurgiques pour produire de l’acier destiné aux marchés africains et internationaux est actée via un partenariat avec le Camerounais Prometal. 

La fabrication de rails, poutres et autres infrastructures métalliques, qui permettrait de réduire la dépendance aux importations et de dynamiser le tissu industriel local, est également dans le pipeline. Si ces initiatives se concrétisent, elles pourraient favoriser la création d’emplois qualifiés et l’émergence d’un pôle industriel autour de la métallurgie.

Avec des réserves significatives, un marché mondial porteur et des infrastructures en plein développement, le Gabon semble avoir le potentiel pour devenir un acteur clé du fer en Afrique. Comparé à des pays comme la Guinée, la Mauritanie ou le Libéria, le pays bénéficie d’un accès logistique facilité et d’une stabilité relative, deux atouts majeurs pour attirer des investisseurs. Si les projets en cours respectent leurs échéances et si la stratégie de transformation locale est menée efficacement, l’or gris pourrait bien devenir l’un des moteurs de croissance du Gabon dans les décennies à venir.

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