GABON : BILAN ECONOMIQUE ET BUDGETAIRE 2024

L’année 2024 a été un moment charnière pour les finances publiques du Gabon. Face à un environnement économique mondial complexe, le pays a révisé ses prévisions budgétaires pour mieux répondre aux défis internes. La révision des prévisions de la loi de finances initiale (LFI) vers la loi de finances rectificative (LFR) a révélé des ajustements significatifs dans plusieurs secteurs, notamment les recettes, les dépenses, l’endettement et les projets d’infrastructure. Ces révisions visaient à répondre aux besoins immédiats de financement, à renforcer la position macroéconomique et à maintenir la stabilité dans un contexte de croissance modérée.

La loi de finances initiale (LFI) 2024 avait prévu des recettes totales s’élevant à 2834,9 mds de F CFA, mais la Loi de finances rectificative (LFR) a réajusté ce montant à 2970,2 mds de F CFA, soit une augmentation de 135,3 mds de FCFA représentant une hausse de 5  %. Cette révision à la hausse est due en grande partie à une meilleure performance des recettes hors pétrole et mines qui ont augmenté de 145,7 mds de FCFA (+15  %), atteignant un total de 1099 mds de F  CFA dans la LFR, contre 953 mds de F  CFA dans la LFI. Les recettes provenant des taxes et des droits de douane ont également contribué à cette hausse, bien que les revenus issus des secteurs pétrolier et minier aient montré une légère contraction. Les recettes fiscales ont, en effet, diminué de 0,5%, passant de 1797,6 mds de FCFA dans la LFI à 1787,8 mds de F CFA dans la LFR. 

Cette baisse est essentiellement attribuée à la baisse des contributions des sociétés pétrolières et minières qui continuent d’être des piliers de l’économie gabonaise, mais dont la performance a été affectée par les prix mondiaux des matières premières et les incertitudes économiques. Ces ajustements montrent que, malgré les efforts pour élargir l’assiette fiscale, le Gabon reste encore fortement dépendant des secteurs extractifs, ce qui continue de limiter la diversification de l’économie. Néanmoins, la hausse des autres recettes et l’optimisation de la collecte fiscale sont des signes encourageants d’une volonté de renforcer les sources de financement internes pour réduire cette dépendance.

Ajustement face aux projets d’infrastructure

En ce qui concerne les dépenses publiques, la LFR 2024 a révélé une augmentation notable, avec un ratio de 23% du PIB, contre 19,1% du PIB prévu dans la LFI. En valeur absolue, les dépenses ont été révisées à 2970,2 mds de FCFA, ce qui représente une augmentation de 5% par rapport aux prévisions initiales de 2834,9 mds de F CFA. Cette révision a été dirigée en grande partie vers le financement de projets d’infrastructure vitaux pour soutenir la croissance à long terme. Des investissements significatifs ont été alloués à la réhabilitation des infrastructures de transport et énergétiques ainsi qu’à des projets visant à renforcer les capacités productives du pays. L’augmentation des dépenses sociales a également été une priorité, avec un focus particulier sur l’éducation et la santé, des secteurs clés pour le développement humain. 

Les dépenses sociales, notamment dans le domaine de l’éducation, ont donc été revues à la hausse. L’une des mesures phares a été le rétablissement des bourses au secondaire pour un montant d’un peu plus de 12 en grande partie de F CFA. Le gouvernement a également insisté sur l’augmentation des financements pour la Cnamgs (Caisse nationale d’assurance maladie et de garantie sociale) visant à étendre la couverture médicale des populations. Toutefois, cette hausse des dépenses a également contribué à l’aggravation du déficit budgétaire qui est estimé à – 4,2% du PIB pour 2024 contre – 1,8% du PIB en 2023. 

Une performance économique modérée, mais stable

En termes de croissance économique, le Gabon prévoit une augmentation de son PIB réel de 2,9% en 2024, soutenue par une performance solide du secteur hors pétrole qui croîtra de 3,1%. Cependant, la croissance du secteur pétrolier reste modeste, estimée à 1,7%, ce qui reflète une certaine stagnation dans un secteur essentiel de l’économie gabonaise. Le secteur hors pétrole, bien que plus dynamique, peine encore à compenser les pertes générées par la baisse de la production pétrolière et la lente diversification économique. Couplé à la volatilité des prix mondiaux, ce faible taux de croissance du secteur pétrolier souligne la nécessité de renforcer les investissements dans des secteurs stratégiques tels que l’agriculture, les technologies et les énergies renouvelables qui pourraient offrir une plus grande stabilité à l’économie gabonaise à long terme.

L’inflation, quant à elle, a connu une réduction par rapport à l’année précédente, se stabilisant à 2,1% en 2024, un chiffre qui reste en dessous du plafond de 3% fixé par la BEAC. Combinée à une politique monétaire prudente, cette gestion de l’inflation est un signe positif pour l’économie gabonaise. Elle contribue à maintenir la stabilité des prix et à améliorer le pouvoir d’achat des Gabonais.

L’endettement public : une pression croissante sur les finances gabonaises

Néanmoins, l’une des préoccupations majeures en 2024 pour le Gabon reste l’endettement public qui continue d’exercer une pression croissante sur les finances publiques. En 2024, la dette publique totale est estimée à 73,1% du PIB, contre 70,5% du PIB en 2023, un niveau au-delà du plafond de 70% du PIB fixé par la Cemac. Cette augmentation de la dette est due principalement à l’augmentation des emprunts contractés pour financer des projets d’infrastructure essentiels, couplée à une accumulation d’arriérés de paiement.

La hausse de la dette est également alimentée par un recours accru aux emprunts extérieurs, en réponse à la nécessité de financer des projets de grande envergure dans les secteurs des infrastructures et de l’énergie. Cette situation s’explique par une baisse des recettes pétrolières, secteur clé de l’économie gabonaise, qui génère une part importante des revenus de l’État. L’incertitude des prix mondiaux du pétrole ajoute à la vulnérabilité économique du Gabon, exposant le pays à des risques de liquidité et à un éventuel accroissement de la charge de la dette si la diversification économique n’est pas accélérée. 

Couplé à une gestion complexe des arriérés internes, l’endettement place le Gabon dans une position délicate. Si ces arriérés continuent d’augmenter, cela pourrait aggraver les pressions sur les finances publiques et compromettre la capacité du pays à investir dans des secteurs clés pour l’avenir. Une gestion rigoureuse de la dette publique et une meilleure maîtrise des financements externes seront donc des priorités pour éviter de nouvelles tensions financières. L’année 2024 a donc été marquée par des ajustements budgétaires nécessaires pour répondre à la conjoncture économique et renforcer les bases d’une croissance durable. Bien que des progrès aient été réalisés, notamment avec la révision à la hausse des recettes non fiscales et des investissements dans les infrastructures et les secteurs sociaux, des défis majeurs demeurent. 

En 2025, avec un budget d’ores et déjà estimé à plus de 4200 mds de F CFA, le Gabon s’engage à renforcer les réformes fiscales, à diversifier ses sources de revenus, à gérer les investissements prévus dans les infrastructures pour en maximiser les retours. Pour garantir une croissance plus résiliente, le Gabon se concentre sur la diversification de son économie en ouvrant des perspectives sur le tourisme, l’agriculture et l’exploitation de richesses minières (fer, or, etc.). La route reste semée d’embûches, mais les réformes engagées en 2024 offrent au pays une trajectoire plus solide pour les années à venir 

LND

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