CES SECTEURS QUI ONT TIRÉ L’ÉCONOMIE GABONAISE EN 2024
Après une période marquée par des ajustements institutionnels, l’année 2024 restera sans aucun doute comme celle du renouveau pour l’économie gabonaise. Le pays a repris sa marche en avant. Portée par un rebond des investissements et de nombreuses réformes structurelles, la croissance du produit intérieur brut (PIB) a atteint 2,9 % en 2024, contre 2,4 % en 2023. Une performance essentiellement liée à une série de secteurs moteurs qui ont compensé les fragilités d’autres branches de l’économie. Nous nous sommes proposés de faire un tour d’horizon des activités qui ont le plus contribué à cette dynamique, selon les données officielles issues notamment de la note de conjoncture sectorielle à fin décembre 2024 et d’organismes nationaux et internationaux.
Mines et hydrocarbures comme piliers de la reprise économique
Dopées par la production de pétrole et de manganèse, les industries extractives ont été l’un des principaux contributeurs à la croissance. La production de pétrole brut a progressé de 3,2 % sur l’année, portée par un rendement optimal des puits existants et l’entrée en production de nouveaux champs. À ce titre, au quatrième trimestre 2024, la production de pétrole a atteint 2,4 millions de tonnes, contre 2,3 millions à la même période en 2023. En glissement annuel, la production cumulée s’élève ainsi à 9,5 millions de tonnes.
En dépit du fait que la production de gaz naturel commercialisé a reculé de 6 % tandis que celle du manganèse chutait de 29,3 % au 4e trimestre, portant le recul annuel à 5,8 %, les industries extractives se sont une nouvelle fois affirmées comme le pilier de notre économie. Même si l’indice de production du manganèse a chuté de 42,2 % en glissement annuel, en lien avec l’interruption temporaire des activités de Comilog à Moanda qui a entraîné une perte de plus de 200 000 tonnes de production au dernier trimestre, les opérateurs principaux de ce secteur ont su tirer leur épingle du jeu, avec un chiffre d’affaires cumulé d’environ 7 mds de dollars US sur l’année. La nationalisation de la société Assala Energy et son intégration à la Gabon Oil Company (GOC) ont par ailleurs permis à l’État gabonais de reprendre le contrôle de 25 % de sa production nationale de brut. Cette opération, chiffrée à 1,3 md de dollars US, traduit la volonté des autorités de faire du pétrole un levier de souveraineté et de financement de l’économie.
Les infrastructures publiques comme moteur de croissance
Toujours en 2024, la reprise des chantiers d’infrastructures a généré une activité soutenue dans des secteurs tels que les BTP (+14,9 % de croissance annuelle), le commerce des produits pétroliers raffinés (+5,8 %) et la production de ciment (+17,9 %). En termes de volume, la production de ciment a atteint 215 983 tonnes en 2024, contre 183 187 tonnes en 2023, preuve que quand le BTP va… tout va. Dans le même temps, le commerce des produits pétroliers a enregistré une hausse des volumes distribués de 5,2 % sur l’année, notamment en gasoil industriel et en supercarburant qui ont servi aux grands chantiers. Les ventes de gasoil ont ainsi totalisé près de 400 000 m3 en 2024.
Les retombées en termes d’emploi ont également été significatives. Le secteur BTP s’est imposé comme un grand pourvoyeur d’emplois directs et indirects, notamment dans les villes de l’intérieur du pays. Les échos de différentes sources nous amènent à évoquer le chiffre de 12 000 emplois occupés. Ce dynamisme a aussi stimulé la demande en matériaux de construction et en carburants, renforçant la performance de la distribution pétrolière.
Sur le plan financier, le secteur de la microfinance a confirmé sa montée en puissance avec une croissance annuelle des dépôts estimée à 27,9 %, pour atteindre 59,2 mds de F CFA fin décembre 2024. Les crédits distribués ont augmenté de 25,9 %, avec un encours total de 49,1 mds de F CFA. Le nombre de comptes clients dans les institutions de microfinance a franchi la barre à la fois symbolique et historique de 600 000, preuve d’une dynamique soutenue au cours de ces dernières années.
Le marché de l’assurance n’est pas en reste. Il a enregistré une progression impressionnante, avec une croissance de 84,8 % au deuxième trimestre 2024, tirée par la relance des grands projets d’infrastructures et les contrats liés aux secteurs du pétrole et du bâtiment. L’encaissement total de primes a franchi le cap de 63,5 mds de F CFA en 2024, contre 38,4 mds en 2023. En un an, le secteur des assurances a presque doublé ses encaissements.
Poids lourd en mutation représentant 3,2 % du PIB et 6 % des exportations en 2023, la filière bois a poursuivi sa transformation industrielle et structurelle. La production de bois scié a atteint 886 753 m3, en hausse de 8,7 %. Les exportations de contreplaqués ont progressé de 9 %, avec plus de 105 000 m3 expédiés vers l’Asie et l’Europe. Le nombre d’entreprises de transformation implantées dans la zone économique spéciale (ZES) de Nkok a augmenté, avec l’entrée en activité de cinq nouvelles unités et la reprise de deux autres. L’industrie du bois confirme son rôle de premier employeur privé du pays avec près de 15 000 emplois.
Deux fois plus d’entreprises créées, notamment grâce à la digitalisation des processus
Selon les données officielles, 2 149 entreprises ont été créées en 2024 contre 1 236 en 2023, soit une hausse de 74 %. Cette vitalité est particulièrement perceptible dans les secteurs des services, du e-commerce, de l’agroalimentaire et de la construction. Les jeunes de 21 à 40 ans représentent 55 % des nouveaux entrepreneurs, majoritairement concentrés à Libreville, Port-Gentil et Franceville. Cette dynamique entrepreneuriale a été soutenue par une meilleure dématérialisation des formalités via l’ANPI, la réduction des coûts de création et les programmes d’accompagnement lancés par des incubateurs locaux.
Les services aux entreprises ont progressé de 25,3 %, notamment grâce au regain d’activité dans les segments de l’ingénierie, de la sécurité, du conseil et de la maintenance industrielle. Cette tendance a été renforcée par la relance des contrats avec les grands groupes et l’externalisation croissante de certaines fonctions non stratégiques.
Seul secteur en légère baisse, les télécommunications. Les opérateurs de ce secteur ont enregistré une croissance modeste de 1,7 % en 2024, portée par la montée en puissance de l’internet mobile avec un taux de pénétration mobile à 135 %. Le chiffre d’affaires généré par les opérateurs télécoms s’établit à près de 146 mds de F CFA.
Conclusion : après un début timide et incertain, l’année 2024 a confirmé la capacité de résilience et d’adaptation de l’économie gabonaise. Si les hydrocarbures et les mines restent des piliers incontestés, la diversification économique s’accélère avec l’émergence de nouveaux secteurs porteurs. Le défi de 2025 consistera donc à consolider ces acquis tout en réduisant les fragilités structurelles et en approfondissant les réformes pour rendre cette croissance plus inclusive et durable.