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Actualité L’ARTF MET LES ENTREPRISES SUR LES BONS RAILS

Créée en 2010, l’ARTF est une autorité administrative indépendante de l’État chargée de réguler l’ensemble du dispositif du réseau ferroviaire. Cet organisme assure des missions de contrôle, de conseil et d’arbitrage relatives aux infrastructures. Au Gabon, l’ARTF peut être comparée à l’Arcep, qui est l’autorité de contrôle des communications. L’ARTF est membre de l’Union internationale des chemins de fer (UIC) depuis 2018. Cette dernière est une association internationale à but non lucratif et représente au niveau mondial les entreprises ayant une activité dans le domaine du chemin de fer. Elle regroupe les différents acteurs du système ferroviaire, soit plus de 200 membres sur les cinq continents. L’ARTF est l’un des acteurs clés du développement économique du Gabon. C’est à ce titre qu’elle s’inscrit dans le PAT (Plan d’accélération de la transformation) pour intégrer le pivot économique fondé sur la cadence de développement du transport ferroviaire, notamment du transfert des matières premières en tête desquelles les produits miniers qui à eux seuls représentent plus de 47 % du PIB. S’y ajoutent le fret des marchandises, le transport forestier, celui des hydrocarbures et des populations. Notons que les plus hautes autorités portent une attention particulière au développement du chemin de fer, pilier essentiel de la diversification de l’économie gabonaise et des objectifs de l’après-pétrole. L’ARTF est dirigée par son secrétaire exécutif, Monsieur Patrice Nendjot, en poste depuis le 6 mai 2021. Nous l’avons rencontré.

Portrait & Parcours Patrice Nendjot Aboubakar

De nationalité franco-gabonaise, Patrice Nendjot Aboubakar est né à Libreville au Gabon le 17 mars 1977. Après des études primaires et secondaires dans sa ville natale et l’obtention d’un «Bac S», il est envoyé par le Gabon à BordeauxII (Victor Segalen) pour entreprendre des études de médecine, mais s’oriente finalement vers une école de commerce. Il obtient un BTS en comptabilité gestion des organisations puis une licence en économie gestion mention finances, parcours couronné par la réussite d’un master stratégie et expertise financière au Centre de formation en banque, finance et assurance de Paris (CFAB-Paris). Il décroche ensuite un Executive-MBA en évaluation et management des politiques publiques à Sciences Po Paris et est actuellement doctorant en sciences économiques et de gestion à l’université Paul-Valéry de Montpellier 3.

Après une carrière professionnelle en France en qualité de comptable en cabinet d’expertise comptable et d’audit fiduciaire A2C à Boulogne, il revient au Gabon dès 2009, à la demande du président de la République S. E. Ali Bongo Ondimba, et occupe successivement les fonctions suivantes : conseiller du ministre des PME et de l’Artisanat, conseiller du DG des marchés publics, directeur administratif et financier au bureau de coordination du plan stratégique (BCPSGE) à la présidence de la République, puis conseiller économique et financier à l’Autorité de régulation des transports ferroviaires (ARTF) dès 2018. Depuis le 6 mai 2021, il est secrétaire exécutif de l’ARTF.

EE : Monsieur le Secrétaire exécutif, souhaitez-vous ajouter quelque chose à cette présentation succincte ?

Je travaille avec une équipe pour que l’ARTF devienne un pôle de référence, d’action et d’éclosion tous azimuts dans le domaine du ferroviaire sous-régional, non seulement au travers du triptyque contrôle, conseil et arbitrage, mais aussi grâce à une gestion managériale de l’ARTF transparente et rigoureuse. Le transport des populations, de la production et de l’acheminement de nos richesses nationales qui découlent de notre sous-sol constitue un enjeu économique majeur. Le Transgabonais participe majoritairement au désenclavement du Gabon profond. C’est dans cet élan que nous poursuivons nos efforts en améliorant les conditions d’une politique accélérée en améliorant la RSE.

EE : Comment l’ARTF est-elle financée

L’ARTF est financée principalement par le budget de l’État appuyé d’une redevance du concessionnaire et d’autres ressources encadrées par la loi qui l’a créée, conformément à son texte principal. Ces ressources lui permettent de remplir ses missions de régulateur ferroviaire.

Pour mener à bien ses objectifs et dans l’optique de s’arrimer aux exigences du secteur ferroviaire, l’ARTF s’inscrit dans une dynamique croissante de contrôle permanent du PRN (Programme de remise à niveau du Transgabonais) qui a pour objet la réhabilitation en profondeur du chemin de fer, la construction de nouvelles gares, l’achat de nouveau matériel ferroviaire et l’augmentation de la capacité de transport (PAC).

Soulignons que ce programme est un exemple de coopération en matière de financement international entre l’État gabonais, la société Setrag, l’AFD et SFI Proparco dans l’accompagnement et le soutien des opérateurs privés. Outre ce partenariat local, elle se gratifie aussi de l’expertise extérieure par la consultation de l’Union internationale des chemins de fer (UIC) et de l’Union africaine des chemins de fer (UAC). Par ailleurs, l’ARTF salue également l’entrée de l’État, du fonds Meridiam, à hauteur de 40 % au capital de Setrag. Cet apport se traduit par un programme de modernisation, de rénovation et de mise à niveau de l’infrastructure. Il permet d’accélérer le rythme des développements du Transgabonais. À ce titre, les équipes de l’ARTF sont déterminées à mener à bien leur mission et à suivre les différents projets innovants inscrits au programme du PAT 2021–2023.

EE : À propos du PRN (plan de remise à niveau du Transgabonais) : ses premiers objectifs ont été définis à l’issue d’une réunion de travail qui s’est tenue le 31 juillet 2021. Il s’agissait, principalement, de réduire les coûts opérationnels d’exploitation de la Setrag, d’améliorer la fiabilité et la disponibilité du transport, de restaurer la capacité de la voie à son niveau initial. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Certes, les travaux du PRN dans son ensemble sont finalisés à près de 80 % et avancent à grande vitesse. Ceux des zones instables observent un léger retard d’exécution. Depuis le renouvellement des équipes et des différents responsables ARTF, comité suivi et Setrag, nous sommes entrés dans une phase d’accélération des travaux qui présentent aujourd’hui une courbe d’exécution à la croissance exponentielle, et cela depuis mai 2021. Pour résumer, dans l’ensemble, le PRN s’exécute normalement sous le contrôle de l’État via l’ARTF, le comité de suivi, la Setrag et l’AFD.

Comité de suivi : président du comité de suivi, secrétaire exécutif de l’ARTF, représentants de la Setrag lors d’une mission inopinée de contrôle d’exécution des travaux du PRN et zones instables.

EE La charge de l’exploitation de la voie ferrée incombe à la Setrag. Pour être très clairs, techniquement, quelles sont les obligations de l’ARTF vis-à-vis de la Setrag ?

La Setrag est le concessionnaire, l’exploitant de la voie ferrée, elle entretient et organise à ce jour les sillons. Nous travaillons en binôme avec la Setrag et observons le respect du cahier des charges, de la régulation, qui passe par le contrôle, l’arbitrage et le conseil. La Direction technique et exploitation ferroviaire est le maillon de l’expertise technique au sein de l’ARTF. Elle est composée de 54 agents, ce qui représente presque la moitié des effectifs. Bon nombre d’entre eux sont sur le terrain. Dès mon arrivée, j’ai tenu à redynamiser le volet technique pour inverser la pyramide des métiers qui étaient essentiellement composée de profils administratifs. Cette direction constitue la matrice de surveillance et de respect des normes du domaine ferroviaire. Lors d’un déraillement, par exemple, depuis le terrain, nous en déterminons la cause : est-elle humaine, technique ou infrastructurelle ? Quel en a été l’impact sur l’environnement ? Cette analyse étant actée, nous suivons l’évolution de la remise en condition et notifions la réalisation des réparations. Nos rapports sont adressés à nos référents, notamment les plus hautes autorités de l’État. Le volet formation de nos agents est un facteur continu en termes d’amélioration d’expertise des agents. Les cours sont prodigués par des spécialistes, des inspecteurs ferroviaires. En ce moment, une trentaine de stagiaires suivent une formation composée de 11 modules. À l’issue de celle-ci, les agents concernés seront opérationnels et en position légitime de faire remonter à leur hiérarchie les informations recueillies sur le terrain. En quelques mots, l’ARTF peut être assimilée au gendarme du ferroviaire. Nous nous appuyons sur des procédures normées par le secteur dans lequel nous exerçons. Nos actions passent par le contrôle quotidien du pesage, des immatriculations des trains et wagons, des autorisations et des licences, des modules de formation des agents conducteurs des trains, de la conformité de tous documents dans ce secteur, des coûts tarifaires et de l’application des normes, notamment de sécurité (TCS).

EE : Quels sont les autres acteurs autorisés à utiliser le réseau ?

Il s’agit principalement des opérateurs miniers, notamment les extracteurs de manganèse. Dans ce secteur, citons le plus important, la Comilog, et deux autres, à savoir Citic Dameng et Gabon Nouvelle Mining (NGM) ainsi que dernièrement l’Office minéral port. Rappelons que tous ces nouveaux acteurs ferroviaires sont gérés directement par le concessionnaire Setrag.

EE : Quels sont les projets à court terme ?

Comme toute structure qui se veut émergente, l’ARTF est engagée dans une dynamique de réformes qui visent les objectifs suivants : réduire des coûts opérationnels d’exploitation de la Setrag ; améliorer la fiabilité et la disponibilité du transport ; permettre un accès équitable à tous les utilisateurs ; restaurer la capacité de la voie afin d’augmenter la capacité des sillons ainsi que la capacité de transport ; assurer le suivi et le contrôle du projet de construction d’une seconde voie ; permettre aux populations un voyage plus sûr et confortable grâce au projet d’assistance aux voyageurs (PAV) ; favoriser le développement socioculturel des populations qui vivent le long du chemin à travers la RSE externe. Le secteur ferroviaire est un vivier d’emplois pour les nationaux à travers les travaux lancés.

Les partenaires qui accompagnent l’État, comme GSEZ qui ambitionne de révolutionner le ferroviaire, prêts à recruter et former des conducteurs gabonais. Notre travail est aussi d’orienter les politiques publiques RSE des entreprises ferroviaires. Secteur d’avenir pour la rentabilité par rapport aux actionnaires, l’ARTF a aussi le rôle d’aller susciter le potentiel des acteurs à travers des missions et colloques. L’ARTF vend le potentiel ferroviaire gabonais tant dans la zone Cemac qu’à l’international. Le défi est également hautement sécuritaire à travers la sécurisation des bagages par la mise en place de scanners à bagages, le contrôle de charge des wagons, la pose d’un pont-bascule propre à l’État, la vidéosurveillance de toutes les gares et enfin l’affectation des agents ARTF dans les six grandes gares (Owendo, Ndjolé, Booué, Lastourville, Moanda et Franceville) dans un premier temps. La formation des agents est aussi un objectif phare afin d’inverser la pyramide des métiers au sein de l’ARTF. Outre la RSE, l’ARTF ambitionne la mise en place d’un plan stratégique de développement du secteur ferroviaire. Pour moi, le ferroviaire est tout d’abord une passion. Mes équipes et moi ne ménageons aucun effort pour mériter la confiance du chef de l’État face à l’amélioration des conditions des voyageurs. Le secteur ferroviaire est un levier économique pour préparer l’après-pétrole.

Contrôle inopiné à l’arrivée d’un train en gare.

EE : Quelles sont vos priorités en termes de RSE ?

L’une d’elles est la notion d’égalité de genre : l’égalité entre les femmes et les hommes. À l’ARTF, les femmes et les hommes jouissent de l’égalité des droits et des chances. Le comportement, les aspirations, les souhaits et les besoins de tous sont valorisés et favorisés. Ainsi n’est-il pas étonnant de constater une valorisation dans le secteur ferroviaire. À l’Autorité de régulation de transport ferroviaire, le concept de l’approche genre trouve tout son sens au regard de la présence massive des femmes qui occupent environ 41 % de ses effectifs sur 126 agents. Elles sont valorisées autant que les hommes, tout en tenant compte de leurs spécificités. Elles sont presque omniprésentes dans tous les pôles de la structure, de l’échelle de responsabilité la plus petite à la plus grande, et occupent des fonctions telles que : conseiller, directeur, cheffe de cabinet, secrétaire particulier, réceptionniste, agent technique et technicienne de surface. Par ailleurs, toujours dans le domaine de la RSE, une structure qui se veut compétitive doit pouvoir anticiper sur les stratégies visant à veiller sur climat social paisible. C’est dans cette optique que j’ai tenu à travailler avec les représentations du personnel, en commençant par l’organisation d’une élection des délégués du personnel. À l’issue d’un long processus, notre institution s’appuie maintenant sur un arsenal juridique conforme au Code du travail.

Échanges avec une équipe représentant la compagnie minière Nouvelle Gabon Mining SA.

EE : L’ARTF est membre de l’UIC depuis 2018. Accompagné d’une délégation, vous avez assisté à une réunion importante avec l’UIC à Paris fin juin. Quels étaient les objectifs de la mission ?

Ils étaient nombreux. Il s’agissait dans un premier temps de définir le business model de coopération entre UIC-Afrique (ARA) et l’ARTF ; de structurer le principe d’intégration participative de la régulation ARTF au sein des activités de l’ARA (Assemblée régionale Afrique), c’est-à-dire le fret, les gares, la maintenance, les matériels roulants, la sécurité, la formation, les résolutions sur les concessions et la maintenance de la voie ; de définir deux ou trois sujets prioritaires du domaine de l’ARTF dans le cadre des projets régionaux (UIC-ARA) ; de structurer la démarche de formation à la carte en back office dans les domaines spécifiés par la direction technique et l’exploitation ferroviaire ; de programmer la visite de l’expert UIC Alain Scherrer, relative à l’organisation d’une conférence ARTF–Setrag à Libreville sur les véhicules roulants (taille des trains et simulation du risque de déraillement) ; de mettre en place une task force (région Afrique centrale) sur les spécifications des membres africains, en tenant compte des conditions climatiques. Nos échanges avec les experts UIC ont porté principalement sur la formation des agents ferroviaires, les matériels roulants et la politique d’achat des pièces détachées en termes de consulting des origines à l’acquisition.

Séance de travail au siège de l’UIC à Paris, en présence du secrétaire exécutif Patrice Nendjot Aboubakar et avec le directeur du département système ferroviaire Christian Chavanel, en compagnie de son collaborateur Alain Scherrer, expert matériels roulants UIC, et de Prosper Awouri, directeur technique et exploitation ferroviaire à l’ARTF (à droite).

le 9 septembre 2022

Anne-Marie Jobin

ARTF, Transgabonais, PAT, RSE


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